Théo. – C’est un travail de chaque instant …

L’Ancien. – Compare toute cette attention à celle que porte une mère ou un père à son enfant chéri. Les parents donnent les soins et la nourriture adaptés à l’âge et à la maturité de leur enfant.

Théo. – Alors les débuts de la pratique du Sahaj Marg sont en quelque sorte l’éducation première du pratiquant ?

L’Ancien. – En effet, dès le début nous l’encourageons à la lecture intérieure de sa condition, afin qu’il soit le témoin direct de sa propre évolution, de sa propre transformation.

Théo. – C’est pour cette raison qu’après chaque méditation de groupe, tu demandes aux personnes de prendre conscience de la vibration dans leur espace intérieur, de sa diffusion dans toutes leurs cellules et leur environnement ?

L’Ancien. – Tout à fait, par la méditation nous tournons notre attention de l’extérieur vers l’intérieur. Il est judicieux d’observer ce qui s’y déroule. Le souvenir constant développe la conscience du courant établi dans le cœur de l’aspirant et intensifie sa présence.

Théo. – Après la méditation c’est assez facile, mais la plupart du temps cela semble lointain, couvert par le bruit des pensées, des émotions, nous sommes toujours préoccupés de nous-mêmes, de notre quotidien. Nous perdons vite cette douce vibration intérieure.

L’Ancien. – C’est pour cette raison que nous invitons l’aspirant au silence, puis au silence dans le silence. D’où la grande importance de l’attention, de la vigilance et du discernement. Cela va lui permettre de se connecter volontairement et en permanence au champ vibratoire du cœur et d’en intensifier la vibration.

Théo. – Peux-tu me décrire cet état ?

L’Ancien. – C’est un peu comme une basse continue, tu sais, en musique, cette note qui est jouée en arrière-plan : régulière, sans discontinuer. La mélodie est jouée par-dessus, quelle qu’elle soit.

Théo. – Tu veux dire que la mélodie jouée, c’est notre vie et que le son continu que nous entendons en arrière-plan, c’est le Divin ? C’est ce que nous devons essayer de trouver ?

L’Ancien. – Tout est déjà là, présent de toute éternité, mais nous n’y prêtons pas attention. Le tumulte de nos vies voile cette douce musique.

Théo. – D’où la vigilance et la conscience.

L’Ancien. – Certains pensent, par exemple, qu’ils se ressourcent en faisant des pauses intérieures de mini-méditation au cours de la journée. En réalité, ils se mettent en harmonie, en synchronisation avec le flot continu de la vibration divine et de fait, ils se sentent « reconnectés », ressourcés.

– C’est si subtil que le moindre bruit recouvre le son … dit Théo pensif.

L’Ancien. – Cela ne signifie pas que le son est absent, mais juste qu’il n’est plus humainement audible.

Théo. – D’où ton invitation au silence intérieur et au discernement. Comment faire pour progresser régulièrement dans cette voie, sans régresser ?

L’Ancien. – Tu dois veiller à explorer chaque dimension découverte, la faire tienne, t’en imprégner en restant « branché » en continu sur le canal permanent qui émet ce son, cette vibration vitale, ce AUM sacré.

Théo. – Chaque dimension ?

L’Ancien. – Chacune est un monde fascinant. Nous pourrions y passer toute une vie en émerveillement. Mais ce courant continu nous entraîne toujours plus avant. Nous devons le faire nôtre consciemment, volontairement, pour qu’il nous emporte au loin, à l’infini de Dieu.

Théo. – Nous méditons donc sur la lumière divine dans notre cœur et pendant une demi-heure nous sommes dans le courant, ce fameux canal …

L’Ancien. – Nous nous en approchons de plus en plus. Si des pensées jaillissent, elles nous distrairont uniquement si nous les suivons ou les entretenons.

Théo. – Autrement dit, ce sont elles qui doivent devenir le bruit de fond, ou plutôt de surface, et le son divin prend alors la première place et monte en puissance.

L’Ancien. – Jusqu’à ce qu’il t’emporte.

Théo. – Et ensuite ?

L’Ancien. – C’est ce que nous appelons le samadhi, là, nous sommes immergés dans le courant divin, nous rejoignons la Source Infinie.

Théo. – J’y ai goûté parfois, mais je n’arrive pas à y demeurer longtemps. Quand je reviens à la surface, cet état de profondeur explose comme une bulle de savon, comme si l’attraction terrestre reprenait tous ses droits. C’est très frustrant, que faire ?

L’Ancien. – Remonte tout doucement à la surface, détache une partie de ta conscience, lui intimant l’ordre de rester au contact de la profondeur, d’être simplement avec, en présence.

Théo. – J’imagine que mon cerveau doit en être capable, après tout, il est divisé en deux, sur trois étages et avec de multiples ères de fonctionnement autonomes, mais quand même…

L’Ancien. – Le cerveau suivra et s’adaptera à l’état que le corps subtil et la conscience développeront. Il est très souple, mais encore un peu primitif, à nous de l’éduquer. Les connexions neuronales et synaptiques se développeront en conséquence.

Théo. – De quelle façon ?

L’Ancien. – Nous avons déjà parlé du QS (quotient spirituel). C’est lui qui aura une incidence majeure sur l’humain, sur son évolution, son cerveau, mais je vois encore plus loin. Aujourd’hui, je veux parler du quotient divin, QD. Il permettra à l’humanité d’effectuer un bond considérable dans l’évolution. Nous sommes actuellement plus proches de l’Homme primitif que de l’être humain accompli. Nos réelles capacités sont encore à l’état latent. La proposition qui est faite aujourd’hui, c’est de rejoindre directement le courant divin central et d’y rester sans se laisser distraire par aucun autre qui diminuerait grandement notre capacité à rester en Dieu.

Théo. – Comment s’y prendre ?

L’Ancien. – Ce courant principal est aussi celui qui a porté la Création. Il est doté d’une énergie infinie. Ce que je propose, c’est de laisser le Divin à l’œuvre au travers de chacun d’entre nous et de voir ce que peut donner l’humanité … Cela va être … incroyable, fantastique … une humanité éveillée …

Théo. – Tu me dis qu’il ne faut pas prendre les choses à l’envers et là tu es déjà arrivé !

– Oui, tu as raison, commençons par le souvenir constant, il nous faut œuvrer au quotidien sans laisser distraire la partie profonde de notre être. Ce sera déjà un bon début pour l’humanité, sourit L’Ancien encore tout à son enthousiasme.

A suivre…

Théophile l’Ancien
Extrait de Dialogues avec Théophile l’Ancien
L’initiation de Théophile le Jeune